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90 ans FSGT I Une thèse sur les stages Maurice Baquet !

Créée en 1934, la FSGT fête cette année ses 90 ans ! À cette occasion, Sport et plein air a préparé une série d’articles traitant de l’histoire de la fédération. Dans ce numéro, il est question des stages Maurice Baquet. Organisés entre 1966 et 1980, ces derniers viennent justement de faire l’objet d’une thèse présentée et soutenue par Nicolas Hibon, un professeur d’EPS…    

© Pierre Mérand & FSGT 

Si les stages « Maurice Baquet », organisés par la FSGT à Sète (Hérault) entre 1966 et 1980, font aujourd’hui figure de « mythes » au sein de la communauté des enseignant·es d’éducation physique et sportive (EPS) et ont grandement participé à la renommée et l’histoire de la fédération, aucun travail universitaire ne s’était encore attaché à en étudier précisément la genèse, le déroulement, l’organisation ou bien les apports sur le plan pédagogique. Présentée et soutenue en novembre dernier par Nicolas Hibon, un professeur d'éducation physique, au sein de l’université Rouen-Normandie, une thèse (Les stages Maurice Baquet de la FSGT : formation continue et militantisme des enseignants d’EPS) apporte un éclairage scientifique complémentaire à l’ouvrage de plusieurs responsables de ces stages publié en 2005 *.  

En complétant les archives de la fédération par celles de Robert Mérand et de René Moustard, respectivement président et secrétaire du conseil pédagogique et scientifique (CPS) de la FSGT, mais aussi par celles du Parti communiste français, du ministère de la jeunesse et des sports et par une revue d’ensemble de tous les articles publiés dans Sport et plein air entre 1966 et 1980, le travail mené visait donc à combler le vide historiographique existant lorsqu’il s’agit d’aborder précisément ces formations. Toutes ces sources archivistiques variées sont enrichies par les témoignages d’animatrices et animateurs des stages de Sète comme Jacqueline Marsenach, Paul Goirand, Raymond Dhellemmes ou bien Thierry Tribalat.   

 

Des formations « de type nouveau »  

 

La première partie du manuscrit retrace la genèse des stages Maurice Baquet à l’aune du parcours professionnel et militant de Robert Mérand. Ce dernier, professeur à l’École normale supérieure d’éducation physique et sportive et handballeur de haut niveau jusqu’au début des années 1950, rejoint la fédération en 1948, dans la foulée de son adhésion au PCF.   

Robert Mérand impulse un renouvellement dans la formation des cadres et des entraîneur·ses de la FSGT à travers la promotion d’un nouveau modèle de stage. Placé·es en situation de pratique compétitive, les participant·es ne viennent plus recevoir une formation « clés en main », mais observer des situations de jeu réelles puis construire activement les solutions adaptées aux problèmes techniques ou tactiques rencontrés.   

Le premier stage dit « de type nouveau » organisé à la fédération a lieu en août 1951 au centre régional d’éducation physique de Dijon. Deux ans plus tard, ce modèle est étendu et, en 1955, un cercle d’études chapeauté par des enseignant·es d’EPS formateurs et formatrices dans des écoles de cadres (Robert Mérand, mais également Maurice Baquet, René Deleplace, Jean Guimier ou encore Yvon Adam…) est créé.   

Au début des années 1960, les professeurs d’éducation physique et sportive s’emparent davantage des instances de formation de la FSGT, parviennent à relancer la participation aux stages de spécialités et initient des formations inter-spécialités. Cette alliance bénéficie aux deux parties. La fédération peut profiter des compétences techniques des enseignant·es pour mieux encadrer ses cadres lors de stages tandis que les professeurs d’EPS, dont la formation continue n’est pas encore développée par leur administration d’attache, peuvent bénéficier du réseau de relations de la FSGT (colonies de vacances, patronages municipaux, relations internationales) pour enrichir leurs compétences et conduire des expérimentations pédagogiques.   

En juillet 1965, un stage « d’expérimentation comparée » est organisé par Robert Mérand et les membres du cercle d’études de la fédération à Sète, en collaboration avec 145 enfants de la colonie de l’Enfance ouvrière au grand air « Gai-soleil ». Pour les stagiaires, en grande majorité enseignant·es d’éducation physique, il s’agit d’intégrer la pratique sportive à la vie des colons et d’en faire l’outil éducatif privilégié. Les grands principes issus des formations « de type nouveau » sont employés : observation systématique des colons placés dans des situations compétitives, appui sur la créativité collective des stagiaires et recours aux références scientifiques du moment pour produire des hypothèses de travail et interroger les pratiques de terrain.   

En juillet 1966, l’expérience est reconduite avec l’ensemble des enfants de la colonie « Gai-soleil », soit 400 enfants. Le stage prend l’appellation « Maurice Baquet » pour rendre hommage au célèbre formateur de la FSGT disparu en juillet de l’année précédente.  

 

Trois périodes   

 

Les trois parties suivantes de la thèse décrivent et analysent chaque action des formation entre 1966 et 1980. Dans chacune des parties, les travaux effectués par les participant·es sont mis en relation avec ceux menés dans le cadre scolaire de l’EPS. Si les faits marquants de chaque stage sont soulignés par l’auteur, ce dernier identifie trois périodes dans leur histoire.  

De 1966 à 1969, la période d’édification et de consolidation des formations correspond à la mise en place du CPS comme structure d’innovation pédagogique solide. Pour les enseignant·es d’éducation physique, ces stages sont de plus en plus attractifs en l’absence d’offre de formation proposée par l’administration. Le Mémento, pourtant destiné aux moniteur·rices dans un cadre de colonie de vacances, est un outil apprécié des professeurs d’EPS au moment où le législateur souhaite une hégémonie sportive dans les pratiques d’enseignement de cette discipline.    

De 1970 à 1974, les stages Maurice Baquet atteignent leur « âge d’or ». Pendant cette période, les participant·es sont en constante augmentation et le conseil pédagogique et scientifique de la FSGT atteint son pic d’adhésion. Sur le plan des travaux effectués, les stagiaires et les responsables contribuent à mettre au point des propositions pédagogiques novatrices car elles sont ancrées dans le courant de l’éducation nouvelle et des méthodes actives. La troisième série du Mémento publiée à partir de 1974 est, sur ce point, en rupture totale avec les deux opus précédents.   

Enfin, de 1975 à 1980, la perte d’attractivité et le déclin des formations de Sète sont étroitement liés au développement de l’universitarisation de l’EPS. Si de nouvelles problématiques sont abordées, comme celle de la haute performance et celle du « loisir-actif », elles ne permettent pas de retenir la chute du nombre de participant·es…   

 

* Les stages Maurice-Baquet (1965-1975) : genèse du sport de l’enfant (éditions L’Harmattan). 

 


 

Quels sont les principaux apports de cette thèse ? 

 

Sur le plan pédagogique et didactique, Nicolas Hibon montre que les stages Maurice Baquet de la FSGT ont joué un rôle déterminant dans la mise en forme scolaire des activités sportives. La troisième série du Mémento apparaît particulièrement novatrice sur le plan de la méthode d’enseignement proposée. L’auteur montre également que c’est sur le modèle des formations, elles-mêmes inspirées des premiers stages dits « de type nouveau », que se développe la formation professionnelle continue des enseignant·es d’EPS au cours des années 1970. Enfin, cette étude sur l’histoire des stages de Sète rejette la thèse de l’assujettissement, de l’orchestration ou de l’instrumentalisation de ces formations par le PCF ou bien par des militant·es du Snep. Si une part non négligeable d’enseignant·es responsables ou de participant·es à ces formations organisées par la fédération ont milité à la fois au sein de ce parti et pour cette tendance syndicale, il n’y a pas eu, selon Nicolas Hibon, de relation de subordination entre ces sphères et ces stages.   


 

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