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Égalité | Enfin la parité dans les fédérations ?

Dernière mise à jour : 22 sept. 2022

Les instances dirigeantes des fédérations sportives sont loin d’être les meilleures élèves sur le terrain de la parité, et ce depuis longtemps. Si la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France semble être un pas de plus en faveur de l’égalité femmes/hommes, reste à voir ce qu’il va réellement se passer sur le terrain...


Principe constitutionnel inscrit en préambule de la Constitution française de 1946, l’égalité femmes/ hommes a été renforcée par plusieurs lois successives et par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République qui impose l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. Mais quid de l’égalité femmes/hommes dans le sport ?


Tout a commencé par l’inscription à l’objectif d’égal accès des femmes et des hommes aux instances dirigeantes des fédérations sportives dans le Code du sport (loi du 6 juillet 2000, art.5 modifiant la loi du 16 juillet 1984). Le but était de sensibiliser les fédérations sur ce sujet majeur, et de les inciter à prendre les mesures utiles et nécessaires afin de remédier aux inégalités. Mais cette loi se révélera au final inefficace, et poussera les pouvoirs publics à proposer un dispositif de représentation proportionnelle.

Le principe de ce dernier était clair : que la proportion de femmes ou d’hommes dans les instances dirigeantes reflète celle constatée dans la population des licencié·es éligibles. Ne remédiant pas à la problématique de sous- développement de la pratique féminine, ce mécanisme était surtout « avantageux » pour les fédérations au faible nombre de licenciées féminines et « problématique » pour d’autres au taux élevé... Ce qui expliqua qu’il soit annulé à la demande de la Fédération française de gymnastique (art.5 du décret du 7 janvier 2004 introduisant le point 2.2.2.2.1 de l’annexe I-5 du Code du sport).


Faute d’un dispositif efficace donc, la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle des femmes et des hommes, une loi qui n’était pourtant pas destinée au sport, franchira le cap des quotas. Car si les femmes représentaient environ 35 % des licencié·es des fédérations sportives, 35 % des sportif·ves de haut niveau et un tiers des étudiant·s de la filière universitaire Sciences et tech- niques des activités physiques et sportives en 2014, seulement onze d’entre elles dirigeaient une des 112 fédérations sportives (36 olympiques, 53 non olympiques et 23 multisports).


« En dépit des initiatives prises par certaines (fédérations) pour remédier à la relégation des femmes, seule l’intervention volontariste du législateur peut permettre de rompre avec un système où la domination masculine n’est que rarement remise en cause », estimait la députée socialiste Sylvie Tolmont dans un rapport remis à la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale.

La loi pour l’égalité réelle des femmes et des hommes fut donc votée le 4 août 2014 et instaura des quotas imposant 40 % de femmes dans les instances dirigeantes des fédérations sportives, en dehors de celles comptant moins de 25 % de licenciées (pour lesquelles ce seuil était réduit à 25 %).

Aussi incitatifs qu’ils soient, ces quotas n’auront à leur tour qu’un impact limité puisque parmi toutes les fédérations sportives, seize auront conservé un comité directeur non conforme aux textes, six n’auront pas respecté pas les règles de représentativité et, dans les autres instances exécutives (bureaux exécutifs et directions techniques), la place des femmes sera restée encore plus réduite.

Cap sur les 50 % !

C’est finalement la loi du 2 mars 2022 qui, après des débats houleux, a clairement fixé comme objectif celui de la parité dans le monde du sport. Plus question de proportionnelle ou de nombre de femmes licenciées, il appartient aux fédérations sportives, chargées d’une mission de service public, et donc de développer la pratique du sport pour tous et toutes, d’adopter un fonctionnement respectueux de la parité.

La loi impose ainsi aux fédérations de compter, dès 2024, un écart entre le nombre d'hommes et le nombre de femmes qui n'est pas supérieur à un dans leurs instances dirigeantes. Et il en est de même pour les instances des organes régionaux, ce qui constitue une nouveauté. Le législateur compte sur la création d’un « vivier » territorial pour abonder le niveau national. Les ligues et comités, dont le taux de féminisation est encore plus faible, auront néanmoins jusqu’à 2028 pour s’y conformer.


En dépit d’un rejet du titre 2 de la loi consacrée à la parité par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), le monde olympique et paralympique fut pleinement intégré au dispositif avec un petit aménagement toutefois : seuls leurs bureaux, une entité plus étroite que les Conseils d’administration, sont visés par le Code du sport.

Les quotas n’ont pas rempli pleinement leurs objectifs en 2014 et un peu moins d’une vingtaine de fédérations (dont trois olympiques) sont présidées par des femmes. La réussite de cette loi reposera donc, outre sur l’évolution des mentalités et de la norme sociale, sur son application réelle. La parité relevant à la fois de la responsabilité des fédérations sportives et du ministère chargé des Sports, ce dernier devra veiller à sa bonne application et prononcer des mesures qui pourront aller jusqu’à la suppression de l’agrément des fédérations ne jouant pas le jeu.


Maître Tatiana Vassine

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