Sports extrêmes, risques maximums ?
- Nicolas Kssis

- 30 oct.
- 5 min de lecture
L'hyrox, l'ultra-trail ou encore l'apnée sont à la mode, mais ces pratiques comportent de nombreux dangers pour le corps...

« La notion de sport extrême est utilisée, en l'absence de définition, pour agréger sous une même appellation des sports et pratiques différents », explique doctement l’encyclopédie en ligne Wikipédia. « L’appellation regroupe par exemple des disciplines requérant de l'endurance ou, au contraire, des activités à risque ». De fait, certaines d'entre elles connaissent actuellement un fort engouement.
Prenons l’exemple de l’hyrox, qui rassemblerait désormais des centaines de milliers d'athlètes dans le monde. Le 18 avril 2025, le Grand palais à Paris accueillait ainsi 12 000 aficionados de ce type de compétition. Pendant trois jours, cette foule d’accrocs à l’effort ont rivalisé de sueur et de grimaces sous les yeux du public et des nombreuses caméras venues observer ce phénomène social.
Concrètement, cette discipline hybride se caractérise par l’association de courses successives et d’exercices de force répartis sur huit stations fonctionnelles. Chaque participant·e les effectue, individuellement ou en équipe, ce qui rend les performances comparables.
L’hyrox se présente comme une forme plus ludique et inclusive que les sports qu’il agrège. « Contrairement au CrossFit, le parcours est adapté aux femmes : les charges sont ajustées », assurait Santé Magazine le 17 avril dernier. « L’absence de limite de temps renforce aussi l’accessibilité du sport, attirant un public de plus en plus large. »
Toutefois, derrière les belles images diffusées sur les plateformes vidéo (YouTube ou Twitch) et les réseaux sociaux des influenceur·ses, cette activité se révèle très violente pour le corps et les promoteur·ses ont tendance à en dissimuler les dangers.
Les risques pour la santé se révèlent multiples. D’abord ceux directement liés à la pratique elle-même : chute, blessure lors du passage entre les ateliers ou mauvaise manipulation des poids. Plus gravement, l’intensité des efforts fournis sur une courte durée peut provoquer une élévation brutale de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle. Chez les personnes atteintes d’une anomalie cardiaque, davantage si non diagnostiquée, la probabilité d’arythmie (dysfonctionnement du rythme des battements du cœur), voire d’infarctus débouchant sur un arrêt cardiaque, n’est pas négligeable.
En outre, la multiplication des ateliers élargit le champ des blessures potentielles. La répétition des épreuves avec charge favorise l’apparition de microtraumatismes, et l’absence de maîtrise technique pour chaque geste spécifique nuit parfois gravement à la sécurité des pratiquant·es. En comparaison, le street workout a hérité, de ce point de vue, de la culture préventive de la gymnastique et de l’haltérophilie en termes de précaution posturale.
De façon plus approfondie, les efforts physiques intenses et prolongés conduisent temporairement à affaiblir le système immunitaire, ce qui peut favoriser l’apparition d’infections respiratoires ou digestives après une compétition. Le manque de récupération et/ou le surentraînement, souvent liés à une quête excessive de performance, provoquent des cycles de fatigue chronique et de blessures récurrentes. Enfin, l’hyrox appartient pleinement à la catégorie des pratiques sportives associées à la bigorexie, autrement dit l’addiction au sport, pouvant avoir de lourdes conséquences sur la santé mentale.
Autre discipline très populaire, l’ultra-trail bénéficie notamment d’une forte médiatisation, illustrée par le cas de celui du mont Blanc (25 000 demandes pour 5 000 dossards distribués), diffusé en direct à la télévision sur une chaine de la TNT. L’épreuve consiste en une course d’environ 170 km autour du plus haut massif des Alpes. L’ultra-trail se déroule en effet principalement sur des sentiers de montagne, de forêt ou de campagne, avec des distances dépassant généralement 80 km, parfois 100 km ou plus, et avec un dénivelé positif de plusieurs milliers de mètres.
L'activité ne se limite pas à un simple « défi » personnel, elle comporte surtout de grands risques pour la santé.
La répétition de longues courses sur des sols irréguliers accélère l’usure des articulations, provoquant de terribles douleurs chroniques, surtout aux genoux et aux hanches. Plus préoccupant encore, cette pratique peut favoriser des fractures de stress, tendinites et entorses, et ce bien plus fréquemment que dans les sports dits « classiques ». Par ailleurs, comme toute activité prolongée en extérieur, elle expose à des risques d’hypothermie ou d’hyperthermie selon les conditions météorologiques.
La durée - le dernier vainqueur masculin, Tom Evans, a terminé le trail du mont Blanc en 19 heures 18 minutes et 58 secondes - et l’intensité de l’effort sollicitent aussi puissamment le cœur, ce qui peut se traduire par un danger accru d’arythmie temporaire après une épreuve. Des cas de myocardite d’effort (inflammation du muscle cardiaque) ou de fibrose cardiaque (quand le tissu musculaire normal est remplacé par du tissu fibreux cicatriciel), plus rares, ont pu également apparaître chez les pratiquantes et les pratiquants. Des situations encore plus exceptionnelles, comme le syndrome rhabdomyolytique (destruction massive du tissu musculaire), peuvent induire une atteinte rénale sévère. Et enfin, la santé mentale n’est pas épargnée : l’obsession du chronomètre pouvant amener des troubles du sommeil ou des symptômes dépressifs.
Dernier exemple à aborder parmi les plus connus : l’apnée sportive. Cette discipline aquatique consiste à retenir sa respiration sous l’eau pendant une durée maximale ou sur une certaine distance. Elle se pratique sans équipement respiratoire, bien que palmes, masque et lest soient parfois utilisés. L’objectif varie : retenir sa respiration le plus longtemps possible (apnée statique), parcourir la plus grande distance (apnée dynamique) ou descendre à la plus grande profondeur (apnée profonde).
Cette pratique - largement héroïsée par le cinéma, notamment dans Le Grand bleu de Luc Besson - peut s’avérer périlleuse, d’autant plus qu’elle est bien moins encadrée légalement (hormis un certificat médical spécifique) que la plongée avec bouteille.
L’apnée implique inévitablement une hypoxie (manque d’oxygène) et une hypercapnie (accumulation de CO₂ dans le sang), pouvant provoquer une syncope, en particulier lorsqu'elle est statique ou profonde. Sur le plan neurologique, l’hypoxie prolongée induit parfois des épisodes dits de « blackouts », ou plus vulgairement des évanouissements plus ou moins longs, et, en cas de répétition, des risques de lésions cérébrales irréversibles. Les variations de pression subies pendant la descente peuvent aussi causer des barotraumatismes - lésions physiques, par exemple dans les sinus, causées par la variation de pression -, un pneumothorax ou un œdème pulmonaire. Les personnes présentant des malformations cardiaques doivent obligatoirement s’abstenir.
Si vous décidez malgré tout de vous lancer dans ces disciplines extrêmes, il est conseillé de ne jamais pratiquer seul·e, d'être accompagné·e d’un binôme formé, de suivre des formations certifiées et de respecter ses limites. Un bilan médical spécialisé, notamment cardiaque et pulmonaire, est fortement recommandé, même lorsqu’il n’est pas exigé. Il faut enfin s’astreindre à un entraînement rigoureux, incluant la formation technique pour les gestes spécifiques, tout en respectant des périodes de récupération suffisantes, et avoir surtout conscience de son niveau et de sa condition physique avant de se lancer...







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