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Cheminots | Le sport populaire sur de bons rails !

La FSGT, comme l’indique le T de son sigle, entretient des liens très forts, voire constitutifs avec le monde du travail. Certaines catégories professionnelles jouèrent un rôle essentiel dans son développement, et en particulier les cheminots qui incarnèrent souvent le rôle d’une belle locomotive pour la Fédération. Montez donc dans le train du sport populaire…

Course à pied organisée à Drancy (93) par l'US nord, club cheminot FSGT, en 1962. © FSGT

La présence des cheminots dans la FSGT doit d’abord se mesurer à l’aune de leur poids numérique au sein de la population française. Lorsque que la Fédération est créée en 1934 et que la SNCF est instaurée par décret trois ans plus tard, ils sont plus de 500 000 à faire tourner le chemin de fer national !


Il s’agit d’une vraie communauté avec un fort sentiment d’appartenance, dotée d’une puissante vie associative qui réside souvent dans ses cités cheminotes et porté par un fort syndicalisme…


On travaille sur les rails de père en fils (les femmes y étant encore très minoritaires à cette époque) et, de par la nature de leur métier, les cheminots sont répartis sur tout le territoire puisque que le train symbolise aussi bien l’unité du pays que le désenclavement de la province au début du vingtième siècle. Ce point explique d’ailleurs pourquoi les travailleurs de la SNCF seront des acteurs décisifs dans le développement national de la FSGT. Citons par exemple le cas de Gérard Chabot cheminot et fils de cheminot, qui fonde, en 1974, le comité du Loiret.


Mais cette influence remonte à plus loin, au début du sport ouvrier. Madeleine Peytavin, de l’Institut d’histoire sociale cheminots de la CGT (Confédération générale du travail), en avait justement déniché certaines traces dès la fin de la Première guerre mondiale. Dans l’Ouest parisien, l’Union Paris-État possède ainsi un groupe sportif de 220 membres. En 1919, un ancien club est transformé en Union syndicale sportive, et se donne comme objectif de faire des sportifs « des hommes sains et forts » (Floréal, 1920).


Dans le réseau Nord, le secrétaire de la CGT Jules Morant occupe, dans le même temps, un rôle de dirigeant à la Fédération sportive du Travail (à l'origine de la FSGT).


Province & clubs

Toutefois, cette présence cheminote, comme nous l’avons déjà dit, ne se réduit pas à la capitale… Alors membre actif de l’Étoile rouge de Toulouse en Haute-Garonne, Marcel Montaubrie s’inscrit ainsi dans le tout nouveau club créé par un syndicat local, l’Association sportive des cheminots de Toulouse, en 1937.


Après la Seconde guerre mondiale, ce résistant s’occupera ensuite du basket au Toulouse cheminots Marengo sports créé pendant l’Occupation, et s’investira aussi à la FSGT au niveau régional, sauvant d’ailleurs le Comité au moment de la scission de 1950 (les socialistes quittent la Fédé pour créer l’Union du sport travailliste qui deviendra la Fédération française du sport travailliste).


Paul Charton, cheminot et fils de cheminot également, commence à travailler aux ateliers de wagons du dépôt SNCF de Dijon-Perrigny en janvier 1937. Militant syndical et du PCF, il rejoint l’Union sportive des cheminots dijonnais avant de devenir président du Comité FSGT de Côte-d’Or puis son secrétaire régional en 1938. Investi dans la Résistance au sein du groupe de sabotage des cheminots (les fameux héros du film La Bataille du rail), il sera arrêté. Déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, il y décédera le 13 octobre de la même année. Une stèle située à l’entrée des ateliers SNCF de Dijon-Perrigny lui rend hommage…


Évoquons maintenant le cas de Simon Miravette. Ouvrier menuisier à la SNCF du côté de Carcassonne (Aude), ce militant communiste, CGTiste et associatif s’engage dans la FSGT à son arrivée à Tarbes (Hautes-Pyrénées) en 1950. Trois ans plus tard, il se retrouvera président du Comité départemental. Dernier cas parmi tant d’autres, en Alsace, Émile Schneider fut successivement secrétaire adjoint de la section CGT des cheminots de Mulhouse en 1956 et président de la Commission de tir FSGT du Haut-Rhin.


La présence cheminote dans la Fédération se matérialise en outre avec un grand nombre de clubs explicitement cheminots, jusque dans leur nom ! Beaucoup seront créés ou renommés après la Seconde guerre mondiale, pendant cette sorte d’âge d’or (conquêtes sociales, essor du rail, fierté professionnelle) de ce monde ouvrier singulier, mais également beaucoup plus tard.


Journaliste, Claire Gil a justement retracé la riche histoire et le développement du Sporting cheminot de pratique omnisports dans la Revue du Comité de Paris (saison 2022/2023) « Tandis que l’année 1936 voit l’avènement de la SNCF, le Sporting club de Paris Orléans change de nom pour devenir le Sporting club de préparation olympique », peut-on lire dans l’article.

« Trente-six ans plus tard, ledit club change pour la troisième fois de nom pour devenir plus humblement le Sporting cheminot de pratique omnisports. »

Football, mais pas que...

Parmi toutes les disciplines présentes dans les clubs cheminots, le football se taille la part du lion, notamment lors de la « Coupe de la vie ouvrière », co-organisée par la FSGT et par l’organe de presse de la CGT. Cette coupe de France du monde du travail représente l’occasion rêvée pour les cheminots de manifester leur fierté communautaire face aux camarades d’autres branches. Et les résultats sont souvent au rendez-vous !


« Nous avons pu donner dans notre dernier numéro les résultats des seizièmes de finale de la Coupe de la vie ouvrière disputés le 12 janvier », est-il indiqué dans le SPA (Sport et plein air) de février 1957.

« Une des caractéristiques de cette journée a été la victoire d’équipes provinciales sur les parisiennes (...) La victoire des cheminots de Bruay sur l’Usec de Versailles qui est une des plus fortes équipes parisiennes est dans ce domaine des plus significatives (...) Ajoutons que la rencontre qui n’avait pu se terminer entre les cheminots d’Argenteuil et Miom s’est rejouée le 26 janvier et a vu la victoire des premiers par trois à un dans les prolongations. »

Cette fidélité au ballon rond ne se démentira pas au fil des décennies suivantes, comme en témoigne le match disputé au Mans (Sarthe) le samedi 7 mai 1983 et opposant l'équipe des cheminots du Mans à l'équipe de l’Association sportive des postes et des télégraphes A de Tours (Indre-et-Loire).


« Pour la première fois de son histoire, la finale de la Coupe du Centre se jouait dans le département de la Sarthe », était-il écrit dans le SPA de juillet 1983.

« Il faut dire aussi que c'était la première fois qu'un club de ce Comité accédait à la finale. Devant un public moyen où nous pouvions remarquer en passant : le secrétaire général du club des cheminots du Mans, le président de la Commission de la Coupe du centre, les deux vice-présidents, le secrétaire ainsi qu'un représentant du corps arbitral de cette Commission, l'arbitre donnait le coup d'envoi. »

Mené un but à zéro à la mi-temps, les cheminots l’emporteront finalement 4-2 face aux postiers…


Mais d’autres pratiques peuvent compter sur l’amour des cheminots et notamment la lutte. « Pour l'ouverture de la saison de lutte en Côte d'Argent, le Red star club des cheminots avait mis sur pied un programme de premier choix », apprend-t-on dans Sport, l’ancêtre de Sport et plein air, de janvier 1936.

« C'est devant 150 personnes environ que se déroulèrent des combats captivants. »

Presque soixante ans plus tard, c’est un club cheminot de Seine-Saint-Denis qui accueillera des fédéraux d’athlétisme. « Initialement prévu à Gennevilliers, les championnats de France FSGT sur piste des 24 et 25 juin ont eu lieu au vieux stade Allende de Noisy-le-Sec », lit-on dans le SPA d’août 1995.

« Le Comité de Seine-Saint-Denis, le Club des cheminots noiséens et la ville de Noisy avaient mis les petits plats dans les grands pour recevoir dignement ces France FSGT. »

Aujourd’hui encore, cette tradition ne s’est pas éteinte au sein de la Fédération. Du cyclisme en Alsace avec l’Association sportive des cheminots de Mulhouse-Riedisheim ou à la pétanque avec l’Association sportive de préparation olympique vers Sainte-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire), on ne ferme pas de gare dans le sport populaire…

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