Le gras n’est pas l’ennemi des sportif·ves
- Nicolas Kssis
- il y a 6 jours
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Dernière mise à jour : il y a 6 jours
Il ne faut pas exclure les lipides des régimes alimentaires ! Et encore moins de ceux des amateur·rices de sport.

« Aujourd'hui, il vaut mieux manger gras que sucré », déclarait Adeline Cuirot, diététicienne-nutritionniste du sport, en 2019 dans L’Équipe. Cette affirmation peut sembler paradoxale, surtout lorsqu'il est question de santé publique. Il s’impose de rappeler que près d’un quart des adultes français·es seraient en surpoids, principalement en raison de la malbouffe. L’activité physique est en retour présentée comme une des solutions privilégiées pour lutter contre cette « bombe à retardement sanitaire », dixit le député Régis Juanico, auteur de Bougeons ! (Éditions de l’Aube). Se pose alors la question de savoir comment articuler un régime alimentaire équilibré et sa pratique sportive ? En effet, pour perdre du poids, il faut dépenser davantage de calories que celles ingérées.
Les discours culpabilisateurs laissent facilement imaginer qu’il faut réduire ou faire disparaitre les lipides (ou corps gras) de ses habitudes. La mauvaise réputation du gras n’est d’ailleurs pas totalement dû au hasard. Le lobby du sucre aux États-Unis avait ainsi payé, au début des années soixante, des scientifiques afin qu'ils démontrent que les acides gras étaient les seuls responsables de l'augmentation des risques de maladies cardiaques. Depuis, les glucides ont envahi tous les repas.
Une source d’énergie
Pour rappel, communément appelées « graisses », les lipides, constituent, avec les protéines et les glucides, un des carburants essentiels de l’organisme. Or, « les gens ont tendance à supprimer le gras quand ils veulent maigrir », précisait la nutritionniste Adeline Cuirot, toujours dans L’Équipe. « C'est très mauvais pour la santé, car les lipides jouent un rôle essentiel dans le bon fonctionnement du corps, notamment la bonne régulation des hormones. »
Pour s’adonner au sport, et peu importe l’objectif (bien-être, plaisir, performances ou santé), il est indispensable de les intégrer dans son alimentation. Bien sûr, tout dépend de quel lipide il s’agit. Car comme souvent, il existe des bad cops. Autrement dit des mauvaises graisses, généralement dit trans et saturées. Ces dernières se retrouvent massivement dans les fritures, l’huile de palme et les produits ultra-transformés, ce que servent la totalité des fast-foods.
Au contraire, les acides gras insaturés (oméga 3, oméga 6, oméga 9…) présentent des intérêts nutritionnels importants. Ces bonnes graisses (avocat, poisson gras, huile d’olive, noix, graines, etc.) sont indispensables pour un·e sportif·ve. Les lipides se révèlent par exemple une source d’énergie qui va soutenir les efforts d’endurance. Citons les cas des longues courses d’athlétisme (demi-fond, marathons, trails…), le vélo ou la natation. Ils sont mobilisés lorsque les réserves de glycogène (glucides stockés dans les muscles et le foie) s’épuisent ou descendent en dessous d’un certain seuil. Sans surprise, ces sports dits de basse intensité et prolongés nécessitent donc de recourir à un régime alimentaire qui fait droit aux lipides.
Toutefois, ces derniers doivent également être intégrés dans le repas et les encas des amateur·rices de pratiques de haute intensité ou explosives. À titre d’illustration, Arnaud Assoumani, champion paralympique de saut en longueur (médaille d’or à Pékin en 2008), racontait en 2017 dans L’Équipe son expérience en la matière : « Le bon gras, c'est important... J'insiste sur l'adjectif "bon". Il en faut 20 %. On peut même aller au-delà. Je suis aujourd'hui entre 20 et 30 %. Pendant un moment, je n'en mangeais pas assez. »
Essentiels pour la récup’
Autre aspect trop souvent minoré, le gras joue aussi un rôle crucial et positif dans la prévention, la préparation et la récupération physique. De la sorte, au cours de l’effort, le stress oxydatif est susceptible provoquer des inflammations. Les lipides, et plus particulièrement les oméga 3, comportent des propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes. Elles peuvent donc participer à limiter ce stress. En aval, afin d’optimiser la récupération et limiter les courbatures, il a été démontré que la consommation d’oméga 3 pouvaient sensiblement réduire ces effets indésirables après l’exercice physique.
On le comprend, la pratique sportive réclame une alimentation variée et diversifiée. Autrement dit, rien ne nous oblige à se priver des plaisirs de la gastronomie, et donc y compris du gras, du moment que l’on s’applique à choisir les bons aliments (voir encadré). Dernier point, et non des moindres, comme le rappelait la nutritionniste Adeline Cuirot : « Une personne qui ne mange pas d'aliments gras peut par exemple voir réduire sa libido ou même devenir dépressive ».
Bon gras : quelques exemples…
Tous les gras ne sont pas bons et encore moins acceptables. Mais dans quels aliments peut-on dès lors retrouver les lipides les plus profitables, et nécessaires, pour la pratique sportive ? Citons d’abord l’avocat riche en acides gras monoinsaturés, ce qui signifie un apport d’énergie de fond. Il participe également à lutter contre d’éventuelle inflammation et facilite la récupération. Ensuite, viennent tous les oléagineux (noix, amandes, noisettes, noix de cajou…). Ils sont parfaitement adaptés pour les collations pré ou post-entraînement. Dans le même ordre d’idées, les graines se révèlent des sources précieuses d’oméga 3, de fibres et de protéines. Celles de chia vont en particulier être recommandées pour l’endurance. Pour le plat principal, il faut privilégier les poissons gras (saumon, maquereau, sardines, hareng…), surtout réputés pour leurs oméga 3. N’oublions pas, et cela surprendra peut-être, les huiles végétales dites de qualité, c’est-à-dire l’huile d’olive vierge extra (cuisson douce ou crue), l’huile de colza, de noix ou de lin (crues uniquement). À utiliser avec modération, mais régulièrement. Les œufs, qui associent gras et protéines, sont pour leur part un nutriment idéal pour la construction musculaire. Plus surprenant, le chocolat noir (70 % cacao ou plus) procure de bons lipides, des antioxydants et du magnésium. Un petit carré après l’effort représente une garantie de plaisir et de récupération. Et enfin, le beurre de cacahuète naturel (sans sucre, ni huile ajoutée) s’avère être une excellente collation et peut être intégré au petit-déjeuner, en substitution de certaines pâtes à tartiner.
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